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Demandez le "Libération déménagé", journal des branchés

Le déménagement de Libération peut-il être un renouveau ?

Ce matin j’ai eu une révélation.
Moi qui ai sangloté souvent sur la dérive de Libération par rapport à son engagement gauchiste de 1973, baba cool, puis de gauche tout court, j’ai pleuré sans cesse à la peoplelisation de cette gauche, contre ces donneurs de leçon, la prétention de ce gotha branché, les même jeunes vieillissant à la plume, la dérive vers le foot, les programmes télé, vers la publicité à la con, vers la promotion, vers la gagne qui sied aux imbéciles. J’ai bouillu tel du café foutu, à chaque nouvelle formule qui ne servait à rien ; aux douze départs et arrivées de Laurent Joffrin ; je fus lassé des jeux de mot à deux francs devenus ringards, le « titre à la Libé ». Et à la contradiction de principe qu'un journal critique puisse avoir comme actionnaire des capitalistes. Ils n’ont même pas eu l’idée de faire un Libération-dimanche ; n’ont pas eu l’idée de sortir tous les deux jours, ça suffit lorsqu’il y a des difficultés ; ils ont fait des suppléments débiles ; maintenant, journaliste à Libération, ça veut presque dire « pauv’gars ». Enfin, avec le ou les rachats – auxquels il manque un c – et dernièrement le déménagement de ces foutus-à-la-porte, le « nous sommes un journal », j’ai arrêté de pleurer et de sourire pour enterrer mon journal en tirant un trait sur ma jeunesse ; j’ai dit un trait seulement par un voile. Puis je suis passé au delà, de l’énervement. Libération est un simple Parisien Libéré des branchés. Une feuille de chou, un canard comme d'autres.

Mais après avoir bien touché le fond, voici… au fond un petit journal bien modeste, avec une direction artistique pas trop désagréable, qui balaye l’actualité. Moins poujadiste que le Parisien, ou disons poujadiste moderne, avec les idées reçues adaptées. Moins bourré de lecture chiques que le Monde ; ou d’un autre chic moins chic.

De temps en temps, ça vaut le coup d'aller y jeter un coup d'œil, comme sur les autres. L'espoir renait. Car c'est le quotidien mode pour les bobos et hypster que nous sommes et qu'il faut être un peu, car tout le monde est bobo. C'est un quotidien papier-journal tout venant, branché et critique, pourquoi pas ? Culture branchée, people branchés, l’organe des centre-villes. Artistes bankable, cinéma, musique, arts à la mode, compétent dans le ce-qu'il-faut-en-penser, émettant quelques idées pourquoi pas, avec des signatures redevenues inconnues. Balles neuves.C'est heureux.

Il en faut un, comme le Parisien est l’organe des petites gens, le Monde pour les profs, le Figaro les gens de biens des beaux quartiers, et l’Équipe pour ceux qui gâche leur vie à regarder le sport, au lieu d'en faire.

Alors Libération Déménagé : en avant à toute vapeur dans la boue !

Joël

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